lambeau

Éditions GALLIMARD – FOLIO

Le lambeau

Un roman de Philippe Lançon
Une recen­sion de Francis Jubert.

Philippe Lançon est l’un des jour­na­listes res­ca­pés de la tue­rie de Charlie heb­do du 7 jan­vier 2015 per­pé­trée par les deux frères Kouachi.
Il en est sor­ti vivant, mais défi­gu­ré. Trois ans plus tard, il publiait son troi­sième roman, Le Lambeau.
Le titre de ce roman ren­voie à un terme spé­ci­fique à la chi­rur­gie plas­tique qui cor­res­pond à une tech­nique de recons­truc­tion (consis­tant à dépla­cer un tis­su afin de com­bler une perte de substance).

Francis Jubert

lambeau

À la manière de Soljenitsyne dans Le Pavillon des Cancéreux, Lançon raconte dans Le Lambeau son séjour à l’hôpital de la Pitié-​Salpêtrière, ses déam­bu­la­tions avec « les gueules cas­sées » (lire l'extrait des pages 179 – 180).
Sans que ce soit inten­tion­nel, il rend hom­mage à l’association L’humain au cœur du soin et à sa phi­lo­so­phie : « l’autre comme soi, l’autre comme soin. »
Je le cite : « Au-​dessus de moi est appa­ru le visage de mon frère. J’ai sen­ti qu'il m’était arri­vé quelque chose de grave… j’ai pen­sé que cha­cun de nous n’avait qu’un frère, l’autre, et cher­ché ce que pour­rait être sa vie sans la mienne et, le regar­dant fixe­ment, la vie sans la sienne » (extraits pp. 114 – 115).

On ne sort pas indemne de cette lec­ture bou­le­ver­sante : Lançon par­tage avec nous son expé­rience de patient dou­lou­reux et tente de nous faire entre­voir ce que c’est que de :

  • « vivre à l’intérieur de la souf­france » (extraits des pages 129 – 130), au point de n’être plus qu’un être souffrant ;
  • côtoyer au quo­ti­dien des patients dans cet état : « la dou­leur des autres, qu'il avait appris à mesu­rer, me tran­quilli­sait » (extraits des pages 220 – 222).

Philippe Lançon raconte sur­tout, et c’est ce qui fait tout l’intérêt du livre, son enga­ge­ment patient pen­dant le temps de sa recons­truc­tion, un enga­ge­ment qui a pris la forme d’un véri­table com­pa­gnon­nage avec sa chi­rur­gienne, Chloë Bertolus, qui a « refait de lui un homme avec un visage ». Chloë, « cette fée impar­faite » qui lui a don­né une « seconde vie », avec qui il a noué des liens d’intimité très forts (extraits p. 239 – 240). Et dont il a fini par deve­nir le « chro­ni­queur » (p. 241).

De manière très sub­tile, Lançon décrit l’usage qu’il fait des grandes œuvres lit­té­raires, notam­ment du Proust de La Recherche qui lui ser­vait de prière pré­opé­ra­toire (p. 279) et qui est deve­nu un « contre­poi­son à sa bien­veillance exta­tique » vis-​à-​vis de sa chi­rur­gienne » (ibid).

Sa bio­gra­phie

Philippe Lançon est un auteur, jour­na­liste et cri­tique lit­té­raire fran­çais né en 1963 à Vanves. Il est diplô­mé du CFJ – Centre de Formation des Journalistes (pro­mo­tion 1986), jour­na­liste au quo­ti­dien Libération, chro­ni­queur et cri­tique lit­té­raire, avec une pas­sion par­ti­cu­lière pour la lit­té­ra­ture latino-​américaine. Il a long­temps tenu la chro­nique Après coup consa­crée à la télé­vi­sion et a par­ti­ci­pé au lan­ce­ment des pages Portrait. À la fin de 2014, il devient un membre de la tri­bune « théâtre » du Masque et la Plume sur France Inter.
Reconnu par ses pairs pour son style jour­na­lis­tique, il obtient le Prix Hennessy, qui récom­pense la qua­li­té de ses articles lit­té­raires et le Prix Jean-​Luc Lagardère du jour­na­liste de l’année en 2013.

Le 7 jan­vier 2015, il est gra­ve­ment bles­sé lors d'un atten­tat contre Charlie Hebdo, ce qui l'amène à subir une inter­ven­tion chi­rur­gi­cale lourde de quatre heures au niveau du visage. Il subi­ra jusqu'à 22 pas­sages au bloc, dont 13 opé­ra­tions pour sa mâchoire.

D'autres écrits de Philippe Lançon

Monographie sur l'artiste Jean Daviot, Victoire édi­tions, Paris, 1998
Sous le pseu­do­nyme de Gabriel Lindero, Je ne sais pas écrire et je suis un inno­cent, Paris, Calmann-​Lévy – L’Élan, Paris, édi­tions Gallimard, coll. « Blanche », 2013
Préface de La Légèreté, de Catherine Meurisse, Dargaud, avril 2016
Les îles, Paris, Jean-​Claude Lattès, 2011

« Le lambeau » a reçu de nombreux prix

Prix spé­cial du jury Renaudot (2018), prix Roger-​Caillois (2018), prix Jean-​Bernard de l'Académie de Médecine (2018), prix Humanisme du Salon maçon­nique du Livre de Paris (2018), prix Femina (2018), prix du roman News (2018), Prix des Prix (2018), Meilleur livre de l'année du maga­zine « Lire » (2018).

Le lam­beau est paru aux édi­tions Gallimard,

  • col­lec­tion « Blanche », le 12 avril 2018,
    512 pages – ISBN-​13 : 9782072689079.
  • col­lec­tion « Folio », le 3 jan­vier 2020
    512 pages – ISBN-​13 : 9782072873706.

Publié le 6/​01/​2024 – Francis Jubert – gdc

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